Qui rémunère l’agent sportif ?
L’agent sportif est une personne qui met en rapport les parties (joueurs, entraîneurs et clubs) intéressées à la conclusion d’un contrat rémunéré ou d’une convention de transfert d’un joueur de football.
Il peut aussi bien être mandaté par un club que par un joueur. Mais nous nous intéresserons ici uniquement à la seconde option : l’agent mandaté par le joueur.
L’agent agit dans l’intérêt exclusif de son client, le joueur, le seul à pouvoir le rémunérer : « Un agent sportif ne peut agir que pour le compte d’une des parties au même contrat, qui lui donne mandat et peut seule le rémunérer » (article L. 222-10 du Code du sport issu de l’ordonnance n° 2006-596 du 23 mai 2006).
Une enquête menée entre 2004 et 2005 par l’Inspection générale de la jeunesse et des sports dénonçait le non-respect de l’obligation faite au mandant de rémunérer l’agent.
Les clubs se sont alors substitués aux sportifs pour payer directement leur agent sans faire transiter les sommes par le patrimoine des joueurs.
Une telle situation permettait aux footballeurs professionnels de ne pas intégrer cette rémunération dans leur revenu imposable et aux clubs ne pas payer les charges patronales sur ces montants.
Afin de donner un cadre légal à cette pratique, la loi n° 2010-626 du 9 juin 2010 a modifié le contenu (et la numérotation) de l’article 222-10 du Code du sport :
« Le montant de la rémunération de l’agent sportif peut, par accord entre celui-ci et les parties aux contrats mentionnés à l’article L. 222-7, être pour tout ou partie acquittée par le cocontractant du sportif ou de l’entraîneur ».
La faculté pour les clubs de régler la commission de l’agent sportif à la place du joueur a donc été rendue possible par la loi du 9 juin 2010.
Après avoir prévu que le club pouvait rémunérer l’agent du joueur, il était nécessaire de prévoir le régime fiscal de cette somme.
Le paiement de la « commission d’agent »
La question est désormais de savoir si cette rémunération constitue ou non un avantage offert par le club à son salarié (à l’instar d’une voiture de fonction par exemple) sur lequel ce dernier serait donc imposé.
La loi du 9 juin 2010 prévoyait que lorsque le club se substitue au joueur dans le règlement de son agent : « Cette rémunération n’est alors pas qualifiée d’avantage en argent accordé au sportif ou à l’entraîneur en sus des salaires, indemnités ou émoluments ».
Les raisons pour lesquelles le règlement de la commission de l’agent sportif du joueur, par le club, ne constitue pas un avantage en argent
Si cette rémunération était considérée comme un avantage, des charges supplémentaires devraient être payées par le sportif alors que le club en fait une prestation de service soumise par nature à la TVA.
Autrement dit, une telle situation est profitable pour les clubs ainsi que les joueurs qui ne vont pas payer de charges sur la rémunération de l’agent. A contrario, le montant des prélèvement sociaux va diminuer ce qui est défavorable à l’État.
C’est la raison pour laquelle, l’absence de prélèvements sociaux sur la rémunération de l’argent par le club avait été critiquée par certains députés qui estimaient qu’elle constituait un cadeau offert à tort aux clubs professionnels de foot pour venir compenser la suppression du droit à l’image collective en 2010 (qui permettait aux clubs d’être exonérés de charges sociales sur 30 % des rémunérations versées à leurs joueurs).
Retour à l’envoyeur
Six mois après la loi du 9 juin 2010, le législateur est revenu sur le régime de la rémunération de l’agent sportif réglé par le club en décidant qu’elle constituait bien un avantage accordé par le club au profit du joueur (loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010).
Les motifs d’un tel revirement
D’une part, la prestation de l’agent constitue un service rendu, non pas au club, mais au joueur dont il représente les intérêts. En application du droit commun, c’est donc au joueur de régler son agent. Dans l’hypothèse où le club se substituerait au joueur pour régler la commission de l’agent, ce règlement constitue un avantage offert au joueur par le club.
D’autre part, le joueur a la faculté de passer au régime réel de l’impôt sur le revenu et ainsi de déduire le coût de la prestation du revenu imposable.
En définitive, le régime fiscal de la rémunération de l’agent sportif du joueur par le club est défavorable au joueur, qui va payer des impôts sur la commission perçue par l’agent, défavorable au club qui va payer des charges patronales sur cette somme, favorable à l’État qui perçoit des prélèvements sociaux.
Crédit photo : The Football Faithful