Le dernier mercato d’hiver a suscité beaucoup de réactions, notamment en raison du mercato faramineux du Chelsea Football Club, récemment racheté par un consortium. Pendant cette période de transferts, Chelsea a enrôlé sept joueurs. David Datro Fofana a signé un contrat de six ans et demi, le liant jusqu’au 30 Juin 2029 Audrey Santos, Malo Gusto et Noni Madueke ont signé un contrat de sept ans et demi, les liant jusqu’au 30 Juin 2030. Mykhaïlo Mudryk, Benoît Badiashile et Enzo Fernández ont paraphé quant à eux un contrat de huit ans et demi, les liant au club londonien jusqu’au 30 Juin 2031. Tous ces contrats présentent une caractéristique notable, ils sont tous d’une très longue durée. Outre-Atlantique, ils sont monnaie courante dans les franchises de baseball ou de football américain, où bon nombre d’athlètes paraphent des contrats d’une durée supérieure à dix ans. Analyse.
Cette pratique est-elle légale ?
Depuis la mise en place du système Monti en 2001, l’article 18 du Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs de la FIFA prévoit que «le contrat d’un joueur professionnel est établi pour une durée minimale allant de la date de son entrée en vigueur jusqu’à la fin de la saison et au maximum pour une durée de cinq ans». Sauf que ce même article prévoit ensuite que «les contrats d’une durée différente ne sont autorisés que s’ils sont conformes au droit national en vigueur».
En d’autres termes, la FIFA fixe une durée maximale de cinq ans mais autorise la signature de contrats plus longs si et seulement si le droit national en vigueur dans le championnat en question le permet. C’est le cas en Angleterre et en Espagne, où Aurélien Tchouameni a signé l’été dernier un contrat de six ans avec le Real Madrid et où Iñaki Williams a prolongé son bail de neuf ans avec l’Athletic Bilbao. En France, des contrats d’une telle durée ne pourraient être homologués car la Convention collective nationale du sport, dans le sillage du Code du sport, précise que la durée des contrats CDD ne peut être supérieure à 5 ans.
Une pratique avantageuse pour les clubs ?
Cette pratique peut s’avérer être ennuyante lorsque le joueur nouvellement recruté n’est pas performant ou lorsqu’il est sujet à des blessures récurrentes. L’Atlético de Madrid, pour ne citer que ce club, se retrouve dans cette situation avec le milieu de terrain Saúl Ñíguez en ayant prolongé son contrat de neuf ans le 1er Juillet 2017. Il est ainsi engagé son club formateur jusqu’au 30 Juin 2026. Pierre angulaire de son équipe il y a quelques saisons, il ne figure plus aujourd’hui dans les plans de son entraîneur au point d’avoir été prêté à deux reprises. Engagé encore trois ans et demi avec un joueur aux performances décevantes, le club madrilène peinera à trouver un potentiel acheteur.
Toutefois, si les contrats longue durée rencontrent un franc succès auprès des clubs, c’est parce qu’ils comportent un avantage comptable éminemment important. Pour prendre la mesure de cela, il est nécessaire de faire le distinguo entre le montant du transfert et l’impact réel de ce montant sur la comptabilité du club acheteur. La conclusion de contrats longue durée permet d’étaler le montant de la transaction sur la durée du contrat afin de réduire l’impact de la transaction sur l’exercice comptable en cours. Cet amortissement permet aux clubs de dépenser pour rendre leurs équipes compétitives tout en contournant les règles du fair-play financier. L’UEFA songerait à contre-attaquer en fixant une limite de cinq ans pour l’échelonnement des transferts. Dans cette hypothèse, des contrats d’une durée supérieure à cinq ans pourront être conclus, mais l’échelonnement du paiement sera réduit.
Tout compte fait, les contrats longue durée sont parfaitement légaux dans certains pays. Certes, ils ne sont pas sans risque pour les clubs mais ils présentent un avantage comptable non négligeable qui les pousse à adopter cette pratique. Résultat, ces contrats sont si présents dans le football actuel, que l’on pourrait se demander s’ils deviendront à terme les contrats types pour les jeunes joueurs à fort potentiel, à moins que l’UEFA sonne le glas de cette multiplication.