Arrêt Malaja – La mondialisation du recrutement des sportifs

par | 10, Oct, 2024

Introduction

Les arrêts Malaja1 et Bosman2 représentent des étapes clés dans l’évolution du droit sportif européen.

L’arrêt Bosman3 a transformé le système des transferts de joueurs en facilitant la libre circulation des footballeurs professionnels au sein de l’Union européenne (UE). De son côté, l’arrêt Malaja, bien que moins médiatisé, a également soulevé des enjeux importants concernant la situation des sportifs non européens.

Ensemble, ces deux décisions marquent un tournant décisif dans la gestion des droits des athlètes.

L’arrêt

Lilia MALAJA, une joueuse de basket-ball professionnel de nationalité polonaise évoluant au Racing Club de Strasbourg et bénéficiant d’un titre de séjour régulier, voyait l’homologation de son contrat de travail refusé pour la saison 1998/1999, par le Bureau Fédéral de la Fédération Française de Basket-Ball (‘FFBB’).

La décision se fondait sur l’article 8-1 du règlement de la Ligue Féminine de Basket-ball. Celui-ci limitait à deux (2) le nombre de joueuses extracommunautaires[1] autorisées à participer au championnat.

Lilia MALAJA était la joueuse de trop ! L’équipe comptait déjà une Bulgare et une Croate, nations qui, comme la Pologne, ne faisaient pas encore partie de l’Espace économique européen.

Dans cet arrêt, le Conseil d’État adopte une position opposée à celle du Bureau Fédéral en annulant sa décision pour violation du principe de non-discrimination.

En effet, l’instance sportive ne respectait pas la Décision n° 93/743/Euratom, CECA, CE du 13 décembre 1993, qui garantit aux travailleurs polonais légalement employés dans un État membre les mêmes droits que les ressortissants communautaires, notamment en ce qui concerne les conditions de travail.

Ainsi, Lilia Malaja, détentrice d’un titre de séjour régulier, devait être considérée comme une travailleuse légalement employée et ne pouvait pas faire l’objet d’une discrimination en raison de sa nationalité.

Par conséquent, le pouvoir d’homologation de la FFBB ne pouvait légalement restreindre l’accès au marché du travail ni réguler l’entrée et le séjour des sportifs étrangers titulaires Conclusion :

Si l’arrêt Bosman a élargi les possibilités de recrutement pour les footballeurs européens, l’arrêt Malaja a approfondi cette évolution en intégrant les sportifs extra-communautaires. En résumé, il a :

(i) réaffirmé le principe d’égalité de traitement entre les travailleurs européens et non européens légalement employés ;

(ii) mis fin aux quotas qui limitaient le nombre de sportifs étrangers pouvant participer aux compétitions sportives en France ;

(iii) précisé que les fédérations sportives ne sont pas habilitées à réguler l’entrée, le séjour ou l’accès au marché du travail des sportifs étrangers.

Plusieurs arrêts de la CJCE ont par la suite confirmé le raisonnement de l’arrêt MALAJA[2], confortant alors cette mondialisation du sport[3].

Cependant, la liberté de circulation des travailleurs n’est pas totale, car des quotas demeurent, souvent justifiés par des considérations sportives ou des exigences de formation. Ainsi, les clubs de Ligue 1 peuvent :

(i) Signer des contrats sans restriction avec des joueurs provenant de l’UE, de l’Espace économique européen, ou de pays ayant un accord d’association ou de coopération avec l’UE.

(ii) Engager jusqu’à quatre (4) joueurs ressortissants de pays ne correspondant pas aux critères du point (i), tels que le Brésil ou le Canada.

Ces règles visent à assurer une compétitivité tout en permettant aux clubs de recruter des talents internationaux.


[1] Au sens de l’arrêt, n’ayant pas la nationalité de l’un des Etats partis à l’accord sur l’Espace économique européen.

[2] CJCE arrêts Maros Kolpak, Simutenkov et Kahveci.

[3] En ce sens, voir le Rapport mensuel de l’Observatoire du football CIES n°85 – Mai 2023.

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