Maxime Beaussire est un ancien boxeur professionnel. Au cours de sa carrière, il a notamment été champion de France des poids welters en juin 2015, champion de France des poids super-welters en octobre 2015 et champion de l’Union Européenne des poids super-welters en 2017 et 2018. Suite à un revers en octobre 2020, Maxime Beaussire dit « Le conquérant » met un terme à sa carrière (au moins provisoirement) et se lance pleinement dans une reconversion professionnelle en tant que promoteur de combats de boxe. Entretien.
Bonjour Maxime, peux-tu te présenter ?
Maxime Beaussire, j’ai été boxeur professionnel pendant 8 ans et je compte à mon actif 33 combats pour 29 victoires dont 11 par K.O, 3 revers et un match nul. Pour revenir sur mes débuts, j’ai alterné entre mes études et la boxe amateur jusqu’à l’obtention en 2012 de mon Master 1 en commerce international. À partir de l’année suivante, je me suis consacré entièrement à la boxe, ce qui était assez rare dans la boxe de voir un jeune avec seulement cinq combats passer professionnel, c’était même du jamais vu en France.
Pour faire un bref résumé de ma carrière professionnelle, j’ai été champion de France en welter puis en super welters en 2015. J’étais dans une telle forme que je voulais tenter l’exploit d’être également champion dans la catégorie supérieure en poids moyen, mais avec les histoires de promoteurs je n’ai pas pu. Accumulant deux titres de champion de France, cela m’a ouvert les portes vers le championnat de l’Union Européenne1. Le combat s’est déroulé en 2017 à Deauville contre un français, j’ai perdu aux points. Néanmoins j’ai été repositionné challenger quasiment instantanément et l’ai battu au deuxième round par K.O à Calais. Par la suite, j’ai défendu mon titre de champion de France au Zénith de Caen devant plus de 4.000 personnes et en live sur l’Équipe 21, sportivement c’est mon plus grand succès.
En septembre 2018 arrive un moment clé de ma carrière, j’accepte d’affronter au pied levé le co-challenger du titre vacant de champion d’Europe2. Les gens autour de moi auraient pu m’en dissuader mais ce ne fut pas le cas et en tant que compétiteur je souhaitais combattre. Suite à cette défaite je stagnais, pour me relancer, je pars fin 2019 en Angleterre m’entrainer « comme un chien » afin de préparer mon futur combat prévu au printemps face à Matteo Signani. La covid en décida autrement. Le combat a été repoussé en octobre 2020, malheureusement ma préparation n’était pas bonne, je me suis fait mal à l’épaule dès le premier round, je perds par K.O au deuxième. Suite à ce combat j’ai pris la décision de faire au minimum un gros break.
À partir de quand devient-on boxeur professionnel ? Autrement-dit, à partir de quand as-tu pu vivre exclusivement de la boxe ?
Il existe une réelle problématique dans la boxe relative au passage en pro. Il n’y a rien pour nous structurer, il faut être hyper autonome. Pour ma part, je me suis auto-promu professionnel, en autodidacte. Je suis allé chercher des sponsors et je faisais autant de combats que possible, c’est ainsi que j’ai réussi à évoluer tout au long de ma carrière. Puis au fur et à mesure, j’ai co-organisé et organisé de nombreux galas dans ma région, comme au Zénith de Caen. J’ai eu la chance d’avoir eu des sponsors qui ont cru en moi dès le départ, sans eux, cela n’aurait pas été possible.
À quoi ressemble le quotidien d’un boxeur professionnel ?
Dans les mois précédents un combat, je m’entraînais six jours par semaine. Debout six heures du matin pour aller courir ou faire du renforcement musculaire. Ensuite, j’enchainais par une séance à la salle avec notamment du sparring ou des leçons sur sacs – pattes avec le coach. Puis à la fin de chaque séance, on faisait du renforcement abdominal. Fin d’après midi je refaisais un entraînement, celui-ci se concentrait sur le physique : cardio, training, etc. De retour à la maison le soir, j’avais un appareil respiratoire qui simulait la haute altitude.
En quoi la Covid 19 a-t-elle impacté ta carrière de sportif professionnel ?
Pour ma part, la Covid a tout chamboulé. Tant moralement que sportivement. Je m’étais préparé comme un fou à revenir sur le ring, la Covid a repoussé le combat. Dans la tête ce fut compliqué à accepter, j’ai réellement fait un blocage avec cette pandémie. Côté physique, je n’ai pas pu me préparer correctement avant le combat. Mon coach n’a pu venir en France que 15 jours avant le combat. Normalement, c’est à cette période que l’on baisse de cadence et règle les derniers détails.
Penses-tu que ton entourage a pu ralentir le développement de ta carrière ?
Le réel regret que j’ai vis-à-vis de ma carrière, c’est de ne pas avoir combattu pour le championnat de France des poids moyens. L’histoire aurait été si belle, ça aurait été du jamais vu. J’étais dans une telle forme que rien ne pouvait m’échapper. Malheureusement mon promoteur du moment n’était pas de cet avis. C’est la vie.
Lors d’une précédente interview, tu disais te donner jusqu’à 35 ans pour remonter sur le ring, où en es-tu dans cette démarche ?
Pour le moment, c’est hors de question. Tout d’abord car physiquement je me suis un peu relâché avec la grossesse de ma femme. Je suis en train de revenir à mon poids de forme, je m’entraîne aussi mais aucun retour de prévu. La chance que j’ai, c’est d’être encore jeune, si un jour j’ai envie de revenir, j’ai encore quelques années devant moi. Je peux tout de même annoncer qu’il est fort probable que je fasse un combat de jubilé.
Quel a été ton meilleur souvenir de boxeur ?
Sans hésitation le championnat de France contre Franck Haroche Horta en octobre 2015. En termes de public, il y avait une ambiance de folie. À l’époque, c’était un peu le mec imbattable, c’était son sixième championnat de France et malgré son âge, il était dans une forme de fou. En plus il y avait aussi un combat psychologique, il m’avait titillé sur les réseaux sociaux. De mon côté, je venais de faire ma prépa aux États-Unis et revenais dans ma vraie catégorie, j’étais l’outsider et pourtant, contre toute attente, c’est moi qui gagne.
Au-delà du contexte, le combat en lui-même était aussi magnifique, au premier round je me prends une rafale de coups et vais au tapis. À ce moment, les 3.000 spectateurs pensent que j’ai visé trop haut, au final je l’envoie au tapis à plusieurs reprises les rounds suivant et gagne par K.O au cinquième. Je deviens champion des welters et super-welters, magique. Mes souvenirs sont intacts.
Tu as entamé ta reconversion en tant que promoteur, peux-tu nous expliquer cette démarche ainsi que le rôle du promoteur de combat de boxe ?
Suite à ma défaite en 2020, j’avais mis un terme à ma carrière et me cherchais pas mal. Je savais que je voulais être indépendant et en mesure de prendre du temps pour ma fille. Étant donné que j’organisais déjà des combats et que je souhaitais rester dans le monde de la boxe, ma reconversion en tant que promoteur est donc apparue comme une évidence.
Selon moi, le métier de promoteur consiste à placer ses boxeurs dans les meilleures conditions possibles, c’est-à-dire gérer sa carrière, lui organiser des galas de qualité de A à Z et lui faire bénéficier de la meilleure visibilité possible.
Quand j’organise un gala, mon équipe et moi-même gérons tout. On s’occupe du lieu idéal, de la salle, des panneaux publicitaires, etc. Donc si un boxeur est originaire de Rouen, on va s’arranger pour organiser un à deux gros événements dans sa ville par an et lui faire bénéficier d’une belle diffusion, télévisée si possible.
Où en es-tu dans cette reconversion ?
À l’heure actuelle, je ne suis pas encore promoteur, je ferai tout en 2022. Pour les six prochains mois, je vais me structurer et peut-être trouver des investisseurs également. Puis l’année prochaine seulement, je prendrais ma licence à la fédération française de boxe. À ce titre, je pense créer une société mais il faut que je compare les différentes formes sociétales afin de déterminer laquelle conviendrait le mieux à mon projet. Néanmoins, je suis dès à présent et officieusement promoteur du prometteur Matteo Hache.
Peux-tu nous décrire la découverte de ton poulain Matteo Hache et tes ambitions pour lui ?
Tout à commencé suite à un message Instagram de sa part dans lequel il me demandait s’il pouvait venir s’entraîner avec moi. Tout s’est fait naturellement, on a commencé à s’entraîner ensemble et à s’apprécier. Matteo est un mec adorable, pétri de talent et surtout un gros travailleur.
À l’heure actuelle, il a cinq combats, c’était d’ailleurs l’un des boxeurs les plus actifs lors de la Covid, il a notamment combattu lors de ma défaite en octobre 2020. En 2021, nous avons prévu jusqu’à huit combats, ce qui est exceptionnel en raison des circonstances sanitaires. En juillet, il combattra durant 6 reprises, puis 8 en août / septembre ? . Après, nous n’aurons aucune limite. L’objectif est le championnat d’Europe. S’il me fait confiance pour sa carrière, je vais tenter de la lui mener tel que moi j’aurai aimé que l’on mène la mienne. Je pense avoir un regard extérieur intéressant qui puisse nous amener à prendre les meilleures décisions.
En plus de notre belle relation, Matteo est un très bon mec, en décembre il a couru 137 kilomètres pour l’association ASAP des sans-abris Normands en rejoignant Caen – Rouen en moins de 24h. Le 7 août prochain, nous avons prévu de rejoindre à vélo le Stadium de Rouen en moins de 24h en partant de Saint-Jean de Mont, soit 480 km. Cette aventure sera l’occasion de soutenir la lutte contre la mucoviscidose.
Comment vas-tu utiliser ton expérience de boxeur professionnel en tant que promoteur ?
C’est compliqué de mettre des mots sur les décisions que doit prendre le promoteur pour la carrière de ses boxeurs. C’est du feeling, de l’analyse de la situation. À tel moment il faut faire tel adversaire car il est peut-être 10-15% plus fort que nous mais à ce moment précis il est sur la pente descendante et de notre côté, au vu de nos entraînements, de nos sensations, c’est le moment de le faire. Cela dépend aussi du lieu, du titre en question, des relations avec les autres équipes et de plein d’autres choses. Moi j’ai la chance d’avoir été boxeur, je sais ce que les garçons ressentent et ce qu’ils vont être capable de donner.
Que pouvons nous te souhaiter durant les 5 prochaines années ?
Je dirais beaucoup de victoires pour mes futurs poulains. Pour chacun d’eux je vais faire un plan et tenter que ce dernier se déroule avec le moins d’accros possible et qu’on accroche le plus de victoires possibles.
Enfin, si je peux me permettre un mot de conclusion, je souhaiterais remercier tous mes sponsors qui m’ont suivi dans ma carrière de boxeur et désormais de promoteur. Je remercie également par avance les futurs boxeurs qui s’associeront à moi, mais aussi les futurs sponsors et chaînes de télévision qui sont prêts à se lancer dans l’aventure. J’ai hâte d’organiser de beaux spectacles.
Crédit photo : Sportmag