Interview de Grégoire Marche (numéro 1 français de squash)

par | 5, Oct, 2022

Rencontre avec Grégoire Marche, numéro 1 français et quinzième mondial de squash. Le Valentinois de naissance raconte au micro de Jurisportiva : sa passion pour sa discipline, la difficile médiatisation du squash ou encore l’absence de son sport aux Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Entretien.

Bonjour Grégoire, peux-tu te présenter dans un premier temps ?

Bonjour, je suis Grégoire Marche, squasheur professionnel de 32 ans. J’évolue sur le circuit international depuis plus de 12 ans maintenant. Je suis numéro 1 français et numéro 13 mondial. Je suis un grand passionné de sport, de gold et de vélo en particulier.

Comment présenterais-tu le squash à une personne qui n’en a jamais fait ?

Le squash est un sport de raquette qui se joue en simple ou en double, sur un terrain de jeu entièrement entouré de murs et, éventuellement, de parois de verre : les deux joueurs partagent et défendent alternativement la même surface de jeu. Chacun frappe à son tour la balle, qui doit atteindre (directement ou indirectement) le mur frontal. Un seul rebond est accepté mais la balle peut être reprise de volée. Une des difficultés du squash est que, contrairement aux autres sports de raquette, la balle vient souvent de derrière, ce qui nécessite un placement particulier. Un match se joue en trois jeux gagnants et un jeu se compte en onze points.

Le squash est un sport explosif, physique mais très ludique et fun avec lequel on prend beaucoup de plaisir sans avoir besoin d’une technique importante à la différence du tennis par exemple. Il y a toutefois pas mal de stratégies pour faire déplacer l’adversaire. On compare parfois le squash à un jeu d’échecs. Il ne suffit pas d’avoir un physique, il faut un mental d’acier pour faire face à toutes les situations et être efficace dans les moments importants.

Parle-nous de cette passion, comment et quand est-elle arrivée pour toi?

J’ai commencé le squash parce que mes parents ont acheté un restaurant dans lequel il y avait trois courts de squash. Ils ont gardé cette activité en plus du restaurant qu’ils avaient acheté lorsque j’avais un an. Dès que j’ai eu l’âge d’avoir une raquette en main, c’est-à -dire très jeune, j’ai été pris de passion pour cette discipline et je ne l’ai plus jamais quittée.

Quelles sont les qualités qui font un bon squasheur ?

Physiquement il faut être explosif et endurant parce qu’un match peut durer plus d’une heure, une heure et demie. On ne peut pas négliger cet aspect là.

Il faut avoir également un bon toucher de balle et une technique bien installée pour avoir des sensations au niveau de la raquette. Il n’y a pas beaucoup d’effets dans le squash comparé au tennis mais il y a un véritable toucher de balle avec plusieurs coups différents.

Avoir de la créativité et une stabilité c’est tout aussi important.

Il faut quoi qu’il en soit, prendre un maximum de plaisir.

Quels sacrifices as-tu dû faire pour vivre de cette passion?

Il y en a eu beaucoup depuis l’âge de quinze ans où je suis rentré au Pôle France à Aix en Provence. C’est sûr qu’on ne peut pas se permettre d’être à 80% dans ce sport. 

Ma vie étudiante n’a pas été forcément celle d’un étudiant lambda mais je ne le voyais pas comme un sacrifice. Ce fût de supers années en tant que junior, avec des personnes saines. Mais c’est vrai qu’en termes de vie privée, personnelle, c’est compliqué de construire quelque chose car on est beaucoup à l’étranger, notamment pour voir la famille.

C’est parfois un peu dur de temps en temps mais disons que c’est le prix à payer pour vivre de sa passion. 

Quelles sont les valeurs auxquelles tu es sensible?

L’honnêteté, le respect, un sport “clean” dans tous les sens. C’est-à -dire sans artifices, sans dopage, et plus “vert”. Ce sont les qualités auxquelles je suis sensible et dans lesquelles je me reconnais le plus.

On est dans un sport avec des valeurs financières cohérentes, nous permettant de garder les pieds sur terre, la tête sur les épaules. On ne peut pas se permettre de mal gérer tout cela, il faut une certaine valeur de l’argent et qui passe par une éducation au départ.

Le plus beau souvenir de ta carrière à ce jour?

Il y en a eu plusieurs.

 Le premier titre de Champion de France, ça fait évidemment quelque chose, tout comme être Champion d’Europe Junior, même si cela remonte à longtemps, cela reste ancré.

Mon premier titre de Champion d’Europe par équipe en 2015/2016, c’était quelque chose de fort car c’est une victoire que l’on a partagé à plusieurs. 

Mes souvenirs à l’Open International de Nantes, que j’ai gagnés 3 fois, sont des sensations indescriptibles car j’avais le public derrière moi. 

Plusieurs souvenirs donc mais le dernier cité fait partie des plus grosses émotions car je jouais à la maison, dans mon pays.

Ton pire souvenir et comment as- tu réussi à te surpasser ?

Il y en a beaucoup aussi, et parfois même plus que de bons moments. À chaque défaite, il faut prendre du recul. Mais les Championnats du Monde par équipe à Marseille en 2017, où on perd en quart de finale contre Hong Kong reste une défaite amer car il y avait de grosses attentes puisque nous jouions à la maison. J’ai perdu mon match et je n’ai pas su surmonter la pression, cela n’a pas été facile à digérer mais cela fait partie des aléas du sport. Il faut relativiser et repartir travailler d’arrache pied. Il faut se servir de ces défaites pour repartir à chaque fois, surpasser ses limites et faire preuve de résilience.

Le squash ne fera pas son entrée aux JO 2024, quel regard portes-tu là-dessus ?

C’est une grosse déception évidemment. Cela fait des années depuis 2004 que le squash est candidat, et même si ces candidatures semblent à chaque fois quasi parfaites pour intégrer les Jeux Olympiques, il y a souvent des questions politiques qui entrent en jeu, où d’autres sports sont préférés. Nous méritons largement cette place et cela manque cruellement pour développer ce sport en France, tant par sa médiatisation que pour son modèle économique. C’est dommage car beaucoup d’efforts sont consentis en vain. 

Dans ma tête, j’ai mis une croix dessus.

Comment améliorer la visibilité de ce sport ?

La visibilité, on pourrait l’améliorer déjà via les Droits TV. Il faudrait que des chaînes gratuites puissent s’y intéresser dans un premier temps et même des chaînes payantes sur certains évènements. Il faut également que la Fédération s’implique encore davantage pour le développement de la discipline dans les écoles, dans tous les clubs de France (qui ont eu du mal financièrement avec la crise du Covid19).

Il faudrait au moins que les personnes puissent être sensibilisées parce que peu de personnes font le premier pas vers ce sport pourtant généralement dès qu’elles essayent, cela devient assez vite une addiction.

On a les bons ingrédients mais il faut travailler évidemment davantage la visibilité pour permettre au squash de se développer en France.

Es-tu accompagné dans ta carrière, si oui, dans quels intérêts?

Oui, tout d’abord par mes entraîneurs, c’est avec eux que je communique le plus et c’est eux qui contribue à mon amélioration jour après jour et être dans les meilleures conditions.

Je suis également accompagné par certains partenaires dont mon partenaire majeur “Tecnifibre” avec qui j’ai une relation de confiance depuis plus de dix ans et avec qui je travaille régulièrement notamment au niveau technique pour ma raquette afin d’arriver à avoir les meilleures sensations.

Je suis aussi suivi par un kiné, ce sont des soins importants dans la carrière du sportif. Il faut prendre soin de son corps pour être performant et constant.

J’ai justement besoin de soutien financier pour que ces personnes qui m’accompagnent et qui sont grandement utiles à ma carrière puissent se déplacer en compétition avec moi.

À ce titre, je suis accompagné depuis peu par Essentiel Sports Agency afin de m’aider à trouver ces sponsors qui voudront se lancer dans cette aventure sportive et humaine.

Dans un sport malheureusement pas encore assez médiatisé, que pouvez-vous apportez à un partenaire ?

Il faut tout d’abord savoir que je suis très disponible pour mes sponsors, notamment quand il s’agit d’échanger avec eux sur le squash. Je propose également des sessions de découverte de la discipline ou bien des conférences sur le squash et les valeurs du sport en général, qui pour certaines sont relativement similaires à celles de l’entreprise.

Le squash n’est pas un sport où la visibilité est toujours la plus intéressante mais généralement ce sont des passionnés qui investissent dans notre sport et ce n’est pas plus mal même si il est vrai que cela est au dépens de la visibilité. 

Pour ma part, je peux afficher le logo de mon partenaire sur mon maillot, mes équipements ainsi que sur mes réseaux sociaux. L’objectif est d’avoir une réelle relation avec le sponsor et non simplement un échange de bons procédés.

Quelles prochaines échéances, quels objectifs sportifs ?

Mes prochaines échéances sont les Championnats du Monde au Caire, un tournoi à El Gouna en Égypte toujours. Après j’ai un tournoi à l’île Maurice et la finale des Championnats de France par équipe au mois de Juin à Nantes et pour finir en Juillet les Jeux Mondiaux de Squash à Birmingham en Alabama aux États-Unis au mois de Juillet.

Ma saison 2021/2022 sera après cela terminée.

Comment envisages-tu la suite de ta carrière ? As-tu déjà réfléchi à l’après?

J’espère au moins jouer jusqu’à ce que mon corps le permette. J’aimerais faire encore au moins trois ou quatre années au haut-niveau.

L’après carrière, j’ai déjà quelques idées notamment dans le golf. Je ne pense pas rester dans le squash. Je pense changer de domaine, éventuellement partir aux États-Unis mais rien de concret pour l’instant. Je ne me ferme aucune porte.

Qu’est ce que l’on peut te souhaiter?

De me faire plaisir dans mon sport et d’atteindre le top 10 mondial.

Crédit photo : Squash Source

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