Annoncée en 2017 par Laura Flessel, alors Ministre des Sports, la « loi sport » est aujourd’hui en passe d’aboutir. Il aura fallu plusieurs propositions pour qu’elle puisse finalement être déposée devant l’Assemblée Nationale le 26 janvier 2021 par des députés de la majorité, sous la forme d’une proposition de loi « visant à démocratiser le sport en France ». Une proposition adoptée par l’Assemblée Nationale le vendredi 19 mars et qui doit maintenant être examiné par le Sénat. Si son titre laisse penser à une proposition ambitieuse, qu’en est-il vraiment de son potentiel contenu ?
Pour commencer, il faut noter que la forme même de proposition de loi, émanant de parlementaires, laisse moins de marge de manœuvre que celle d’un projet de loi, déposé devant l’Assemblée par l’exécutif. Cette dernière forme, qui fut envisagée initialement, permet d’intervenir plus largement dans des domaines, notamment économiques et financiers, où une proposition de loi ne dispose que de très peu de marge. Ce choix s’explique surtout par la difficulté de trouver une place pour un projet de loi dans l’agenda parlementaire, très chargé à un an des élections présidentielles. La proposition de loi présente l’avantage de pouvoir être adoptée plus rapidement, avec des temps très courts de discussions en commissions et en séance. Avec l’inconvénient de réduire la profondeur des réformes envisagées donc.
Quelles sont, justement, ces réformes visant à démocratiser le sport en France ? À la lecture de l’intitulé des 11 articles composant la proposition, on remarque que cette démocratisation se base sur 2 axes développés dans les 2 premiers titres. Le premier vise à rendre la pratique accessible au plus grand nombre, proposant notamment « d’intégrer le sport dans les missions des établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS) » et de « faciliter l’accès aux équipements sportifs scolaires aux utilisateurs extérieurs ». Le second a pour but de rendre la gouvernance des fédérations plus démocratique, en instituant la parité intégrale au sein des instances nationales et déconcentrées des fédérations (ligues et districts), une représentation plus importante des clubs au sein des collèges électoraux des fédérations et une limitation du nombre de mandats à 3 pour les présidents de fédération. Ces changements, qui entreront en vigueur pour les prochaines élections fédérales en 2024, ont le mérite d’améliorer la bonne gouvernance au sein des fédérations, institutions qui ont récemment fait l’objet de critiques à la suite de certains scandales.
Toutefois, on ne décèle pas dans ces propositions de changements majeurs de l’encadrement juridique du sport en France, pas plus dans le 3e et dernier titre concernant le modèle économique sportif. Ce dernier s’adresse essentiellement au sport professionnel, avec notamment des dispositions relatives à la lutte contre le streaming illégal. Une attention vue d’un bon œil par les ligues professionnelles, soucieuses de valoriser les droits audiovisuels de leurs compétitions, dans une période où ils représentent l’essentiel des ressources financières pour certains. À voir dans les faits quels seront les outils mis en place pour lutter face à un tel fléau.
Cette proposition, qui a le mérite d’apporter des changements qui sont nécessaires, paraît toutefois insuffisante au vu de la crise que le secteur sportif traverse actuellement. Il ne semble pas qu’elle puisse avoir un réel impact sur la pratique sportive ni sur le nombre de ses pratiquants, par manque de profondeur certainement. Après trois ans d’attente, nombreux sont ceux qui doutent qu’elle se montre à la hauteur des attentes du secteur sportif …
Article écrit en collaboration avec Thibaut Aoustin, Responsable Relations Institutionnelles et Territoires du Conseil Social du Mouvement Sportif (CoSMoS).