Le transfert-relais, la dernière pratique ciblée par la FIFA qui surprend le SCO d’Angers et le Paris FC

par | 21, Mai, 2021

Alors que la saison 2020-2021 se termine et que les clubs se tournent déjà vers la prochaine, c’est une dure nouvelle qui est tombée pour les clubs d’Angers SCO et du Paris FC, respectivement en Ligue 1 et Ligue 2. En effet, le 30 avril dernier la Commission de Discipline de la FIFA, estimant que les clubs ont violé sa réglementation concernant les transferts, a annoncé de lourdes sanctions à l’encontre des deux clubs : une amende de 30 000 francs suisses pour chacun, mais surtout une interdiction de recrutement lors du prochain mercato. Des sanctions graves qui ont vivement fait réagir les dirigeants angevins et parisiens, qui se sont empressés de contester cette décision auprès des organes de la FIFA.

Les sanctions ont pour le moment été suspendues en attendant que les motivations de la décision soient communiquées aux clubs. Ces derniers se sont notamment étonnés de devoir apporter la preuve qu’ils n’avaient pas enfreint le Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs (RSTJ) de la FIFA, alors que la charge de la preuve est habituellement portée par la partie accusatrice. Une situation exceptionnelle qui est cependant prévue par la FIFA depuis  mars 2020 et l’introduction de l’article 5 bis du RSTJ prohibant les transferts-relais. Cette pratique consiste à faire transiter un joueur par un club intermédiaire dans le cadre d’un transfert entre deux clubs afin de contourner certaines réglementations, généralement d’ordre financier comme l’indemnité de formation. 

Pour y faire face, la FIFA prévoit qu’à moins que le contraire puisse être établi, si deux transferts consécutifs – nationaux ou internationaux – d’un même joueur interviennent en l’espace de seize semaines, alors les parties impliquées dans ces deux transferts (clubs et joueur) seront présumées avoir pris part à un transfert-relais”. Une fois cette présomption de culpabilité établie, la Commission de Discipline est alors en mesure de prendre des sanctions à l’encontre des clubs impliqués, à moins qu’ils puissent prouver le contraire en justifiant ces transferts rapprochés. 

Bien que les deux clubs français contestent ces sanctions, il s’avère en effet que le transfert d’un joueur, Kevin Bemanga, soit exposé à cette nouvelle disposition. Ce joueur français, aujourd’hui âgé de 23 ans, a signé son premier contrat professionnel en juillet 2020 au Paris FC pour intégrer l’équipe réserve, après avoir joué plusieurs années dans les divisions inférieures espagnoles. Dès le mois d’août suivant, il fait l’objet d’un transfert vers le SCO d’Angers, dans un délai inférieur à 16 semaines. La Commission de Discipline de la FIFA semble donc fondée à sanctionner les deux clubs, d’autant plus que d’autres circonstances viennent semer le doute sur les motivations de ce transfert. En signant son contrat professionnel dans un club de Ligue 2, le Paris FC, et non directement en Ligue 1, le montant des indemnités de formation se retrouvent fortement diminuées. Ces indemnités, prévues par l’article 20 du RSTJ, ont pour but de soutenir l’ensemble des clubs formateurs d’un joueur lors de la signature de son premier contrat professionnel. 

Des éléments de nature à laisser penser à la FIFA que cette opération a pu avoir pour but de contourner sa réglementation concernant ces indemnités pour un joueur dont Stéphane Moulin, l’entraîneur d’Angers, n’avait pas été averti de l’arrivée et qui est depuis reparti en prêt à l’équipe réserve du FC Sion, en Suisse. Une suspicion qui pourrait donc avoir de lourdes conséquences pour les deux clubs, qui ont toutefois des raisons d’être surpris par de telles mesures. Déjà, il s’agit de la toute première sanction d’un transfert-relais depuis l’entrée en vigueur de l’article 5 bis du RSTJ, et ensuite parce que cette procédure s’est faite sans respecter le principe du contradictoire, pourtant élément fondamental du droit à un procès équitable. Les deux clubs regrettent en effet de ne pas avoir pu présenter leurs arguments à l’instance internationale afin de renverser cette présomption. 

À voir quelle sera la position de la FIFA une fois les motivations de sa décision communiquées aux clubs. Pour la première sanction prononcée à l’encontre des transferts-relais, on peut imaginer qu’elle souhaite marquer le coup et dissuader les clubs d’avoir recours à une telle pratique. Il est en tout cas certain que le Paris FC, encore en course pour obtenir la montée en Ligue 1, et le SCO d’Angers, qui doit préparer la succession de son entraîneur emblématique Stéphane Moulin, feront tout leur possible pour voir les sanctions levées ou, a minima, réduites.

Nos dernières publications

Paris Arbitration Week 2024 – Discussion organisée par K&L Gates avec le Centre de Règlement des Différends Sportifs du Canada et la Chaire de recherche sur la sécurité et l’intégrité dans le sport de l’Université Laval (Québec)

Paris Arbitration Week 2024 – Discussion organisée par K&L Gates avec le Centre de Règlement des Différends Sportifs du Canada et la Chaire de recherche sur la sécurité et l’intégrité dans le sport de l’Université Laval (Québec)

Il y a déjà deux ans, Jurisportiva vous présentait le Centre de Règlement des Différends Sportifs du Canada (CRDSC)[1], institution unique offrant au contentieux sportif amateur des solutions amiables et adaptées. À l’occasion de la Paris Arbitration Week 2024, le...